La découverte du tissage
Il y a des expériences qui vous marquent, des moments où vous plongez dans un savoir-faire ancestral et ressortez avec un respect profond pour le métier. C’est ce que j’ai ressenti lors de ma journée de stage de tissage à la Cité Internationale de la Tapisserie d’Aubusson. Pendant une journée, nous étions cinq apprentis tisserands. Prêts à découvrir les secrets d’un art millénaire, sous l’œil attentif de notre maître de stage. Je vous partage aujourd’hui, mon immersion dans l’art du tissage à Aubusson.
Un Petit Tour d’Histoire : La Tapisserie d’Aubusson
Avant de vous raconter mon expérience, il est impossible de ne pas faire un petit détour par l’histoire de la tapisserie d’Aubusson. Cette petite ville de la Creuse, nichée au cœur du Limousin, est le berceau d’un savoir-faire inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO depuis 2009. L’art de la tapisserie y est pratiqué depuis plus de six siècles, à tel point qu’Aubusson est devenu synonyme de tapisserie de luxe. Les premières traces de cette tradition remontent au XVe siècle. Lorsque des tisserands flamands s’installent dans la région, apportant avec eux leurs techniques et leur savoir-faire.
Au fil des siècles, la tapisserie d’Aubusson a su s’imposer dans les plus grands palais et demeures, ornementant les murs avec des scènes mythologiques, historiques, ou encore des représentations de la nature. Ces œuvres d’art, réalisées à la main avec une précision et une minutie extraordinaires, peuvent prendre des mois, voire des années, à voir le jour.
Une Journée de Tissage : De la Théorie à la Pratique
Revenons à mon aventure. Dès notre arrivée, nous avons été initiés aux bases du tissage. Nous avons appris à monter notre métier, une étape essentielle et délicate. Le fil tendu, appelé la chaîne, doit être parfaitement aligné et tendu, car c’est lui qui va soutenir la trame, ce fil qui, rang après rang, va donner vie au motif.
À Aubusson, on parle de « basse lisse », une technique où l’on tisse en appuyant avec les pieds. Contrairement à la « haute lisse » où l’on tisse avec les bras. Une particularité amusante du tissage en basse lisse, c’est que l’on dit souvent que l’on tisse avec ses cheveux ! Pourquoi ? Parce que ceux-ci se prennent fréquemment dans la trame, un petit inconvénient qui ajoute une touche d’humour à l’expérience.
Nous avons également découvert les différents outils du tisserand : le peigne, qui sert à serrer les fils de la trame, et la broche, sur laquelle est enroulée la laine. La chaîne, faite de coton à Aubusson, est en lin dans le Nord et en laine aux Gobelins.
Au fil de la journée, j’ai travaillé sur un petit carré de 8 cm sur 8 cm. Un travail de longue haleine, où chaque mouvement compte. Ce petit carré m’a pris la journée entière à réaliser, et je dois dire que j’étais fière du résultat. C’est un métier qui demande une incroyable précision et une grande patience. Je comprends maintenant pourquoi une tapisserie d’Aubusson est si précieuse et, avouons-le, si onéreuse.
Pour terminer une tapisserie, il ne suffit pas de tisser. Il faut encore repasser l’œuvre au fer, à la vapeur, des deux côtés. Une opération délicate qui fixe les fils et donne à la tapisserie son aspect final.
Un Rêve Un Peu Fou
Je suis repartie de cette journée avec mon petit carré de tapisserie, le sourire aux lèvres et des étoiles plein les yeux. Cette expérience m’a donné un aperçu de la complexité et de la beauté de cet art ancestral. Bien sûr, je rêve secrètement d’accrocher un jour une vraie tapisserie d’Aubusson sur un mur de ma maison. Mais pour l’instant, cela reste un doux rêve. Tout à fait hors de mes moyens.
Quoi qu’il en soit, cette journée m’aura permis de m’immerger dans un univers fascinant. Le temps semble s’arrêter, où chaque geste compte, et où le savoir-faire se transmet de génération en génération. Une expérience que je recommande à tous ceux qui, comme moi, aiment les belles choses. Si vous voulez comprendre le travail extraordinaire qui se cache derrière une œuvre d’art, c’est idéal.